Samedi moi aussi, j’ai été frappé par la beauté de Ségolène Royal en une du Monde. Une beauté éclatante assortie de conseils au Président de la République. « Belle comme un je vous emmerde » ai-je pensé. Puis j’ai lu l’interview dans lequel Royal sort peu de l’exercice de langue de bois puis j’ai vu ce portrait d’illustration signé Roberto Frankeberg


Donc Ségolène Royal donne des conseils. Pour donner ces conseils, elle a mis un tailleur brun, un tailleur qui s’il était vert amende ou rose bonbon pourrait faire partie de la garde-robe de la Reine d’Angleterre. Ce tailleur brun arrondit un peu la présidente de Poitou-Charente accentuant légèrement la ressemblance d’allure avec The Queen. J’ajouterais que le bras droit de Madame Royal porte un sac à main. Oui, on peut imaginer très aisément que Mme Royal porte un sac à main de Reine d’Angleterre même si nous ne le voyons pas. Voilà qui accentue encore la communauté d’attitude avec la reine Elisabeth II. L’autre main semble peinte par un grand portraitiste de la renaissance. Cherchez bien dans vos souvenirs, le majeur délicatement replié, l’index pointé mais pas trop, le pouce en légère ouverture, cette main gauche de Ségolène Royal a plein d’ancêtres aristos dans les galeries du Louvre.


Passons à la figure. Il y a dans le regard deux expressions ; l’une dit une forme de souveraineté, l’autre un brin de noble lassitude et l’on croit deviner dans le regard comme un détachement (et peut-être aussi une infime asymétrie). Les boucles d’oreilles rappellent évidemment la jeune fille à la perle et leur éclat dialogue avec celui de la bague de la main droite. Les lèvres ne sont pas maquillées, elles sont peintes, peintes d’un rouge beaux arts, peintes et merveilleusement dessinées.


Je ne sais pas quelle était l’intention de Roberto Frankenberg lorsqu’il a photographié Ségolène Royal mais le résultat est là. Il a transformé une femme politique sans véritable occupation, sans vraie place forte, sans mandat national, une femme récemment ignorée, une femme récemment battue), il l’a transformée en reine mère. Pas en rombière aigrie, en reine mère, en figure dynastique qui s’accorde avec un culot inouï la license de conseiller le Président de la République, ce qu’aucun socialiste ne s’autorise à faire publiquement. Personne n’a de conseils à donner au Président. Qui peut le faire ? Qui a légitimement le droit de le faire ? Personne à part une entité qui lui serait égale voire supérieure. Eh bien les conseils que Madame Royal adresse à son ex compagnon qui font la une du Monde de ce samedi prennent par cette photo, par ce portrait une dimension particulière tandis que le photographe lui invente un costume inédit, celui d’une nouvelle figure monarchique sous la Ve République.

La première Queen, c’est elle.